Ici tout brille, tout est clinquant mais sans jamais être vulgaire. Les destins croisés du Prince de Salina et de Tancredi servent à mettre en lumière la décadence de la noblesse et l'avènement de la bourgeoisie. La noblesse, incarnée par le prince de Salina, représente le bon gout, la culture, l'homme de science, au contraire de ces "nouveaux riches" sans éducation incarné par le père d'Angelica. Visconti arrive avec brio à retranscrire le propos de Lampedusa et sa vision nostalgique, voir réactionnaire, de la société Sicilienne de l'époque et du changement de classe sociale qui s'y opère. La noblesse laisse place à une bourgeoisie dont la richesse s'est battit autour d'une organisation illégale, qui cherche à contrôler l'économie et la politique de la région.Quelques années plus tard cette dernière prendra le nom de Cosa Nostra.
Cette critique sociale s'accompagne également d'une critique des Révolutions qui loin d'ébranler l'ordre établi, ramène inexorablement au point de départ, telle que la révolution du Soleil autour de la Terre. Cette vision ce définie dans le film comme dans le roman par la phrase: « Si nous voulons que tout reste tel que c'est, il faut que tout change ». Tel sera le destin de Tancredi l'opportuniste, qui trahira son idéal révolutionnaire au profit des privilèges inhérents à sa classe.
Notons enfin, l'interprétation époustouflante de Burt Lancaster, qui offre au personnage du Prince une place de choix au coté de Don Corleon ou Boris Lermontov, au panthéon des grands rôles du cinéma. La séquence finale du bal (presque 1h de film), où le prince déambule dans les couloirs et les pièces du palais et l'une des séquences les plus touchantes et les subtiles du cinéma sur le regard que porte un homme au crépuscule de sa vie sur un monde qui lui échappe. Le prince est devenu le "fantôme" d'une société dans laquelle il ne trouve plus de sens et dont il préfère s'exclure.
En deux mots un: Chef d'œuvre! (et ce malgré la séquence de révolution qui a mal vieillit et les longueurs aux milieux du films).